Muchos fueron los testimonios que se oyeron ese día. Un niño
de seis años (octogenario ya) llamada Domingo Murillo rememoró la huida,
mordiéndoles los talones los fascistas, a lo largo de cuatro día.
También el adolescente incansable del nonagenario Martín
Arnal (16 años en el momento del paso y con dos hermanos asesinados detrás)
tuvo fuerza y arrojo para explicar su odisea. Como también lo hizo Guillermo
Viú (la nieve, siempre el espesor de la nieva y el frío) que reprodujo
testimonios orales de la familia.
Y, quizás, por la sensibilidad y la emoción que contagió a
todos quienes la escucharon en un impresionante silencio, merece la pena
reproducirse aquí la intervención (ora en español, ora en francés) de nuestra
compañera y hermana tricolor Chantal Penicault. Dice así:
Comme nombre de personnes de cette assemblée, je suis fille
de républicains espagnols. Ma mère était originaire de Leciñena, près de
Zaragoza,mon père de Garde, Valle de Roncal en Navarre. La jeune sœur de mon père née en 1934
s'appelait Libertad, c'est dire s'ils étaient républicains.
Quand la guerre
civile éclata en juillet 1936, la
Navarre est tombée de suite aux mains des franquistes. Mon père, Demetrio
GORRINDO et son père Juan, ont du quitter leur village précipitamment, dénoncés
par un cousin. Ils sont passés par la montagne en zone républicaine, en Aragon,
et s'engagèrent dans l'armée populaire de la République Espagnole.
Ils ont combattu du côté de Tardienta. En mars 1938, ils
étaient à Benasque et quand la ville est tombée, ils sont passés en France par
le Port de Vénasque, seule issue pour éviter la mort, parmi des milliers de
républicains , civils et militaires.
Mais ils sont repartis aussitôt en Catalogne, comme nombre
de sodats, continuer le combat anti-franquiste. A la chute de Barcelone, la
guerre était perdue pour ces valeureux combattants de la Liberté. En février
1939, 500 000 républicains espagnols,
femmes, enfants, soldats ont franchi la frontière française poussés par les
bombes franquistes.
C'était la Retirada. En France, ils ont été internés, si on peut employer ce
mot, dans le camp de concentration d'Argelès, puis ont été enrôlés dans les
Camps de Travailleurs Etrangers, sur le mur de l'Atlantique. Ensuite, ils sont arrivés dans le Comminges où
ils ont repris leur profession de bûcherons. Mon père a connu ma mère et
a fait sa vie ici. La famille de ma mère, Juanita ESCANERO, a connu un exode
intérieur de plus de 2 ans, reculant vers la Catalogne au fur et à mesure que
les franquistes avançaient.
Mon grand-père, lui, qui avait laissé sa femme et ses 7
autres enfants au village en Espagne, a décidé de repartir, c'était vers 1941.
Il a été emprisonné quelques jours à Jaca puis a rejoint sa famille au village.
Il a repris son travail de bûcheron avec son plus jeune fils. En 1944, ils ont
été victimes tous les deux d'un accident, électrocutés par une ligne électrique
tombée au sol depuis quelques jours. Mais était-ce vraiment un accident?
Mon oncle était âgé d'à peine 15 ans! Ma grand-mère, restée seule avec 6
enfants n'a reçu aucune aide; au contraire, les franquistes lui ont pris la
mule qui servait au débardage du bois, ainsi que des meubles. Mais pour
d'autres ce fut pire!
L'après guerre a été terrible pour les républicains restés
ou revenus en Espagne. Dans certains villages, les femmes ont été tondues, les
franquistes les forçaient à boire de l'huile de ricin pour les rendre malades
et les exhibaient dans le village en leur chantant des chansons. Humiliations,
viols parfois, mais aussi de nombreux emprisonnements et exécutions, uniquement
parce qu'elles étaient au parti communiste par exemple, comme les 13 roses, ces
jeunes femmes fusillées en août 1939 par les franquistes.
Les républicains ont aussi été condamnés aux travaux forcés.
Entre 1939 et 1945, ils ont construit des barrages et des routes, en
particulier dans les Pyrénées. Nous participons à l'hommage à ces esclaves du
franquisme, à Igal, en Navarre. Là,
chaque année, témoigne Luis ORTIZ ALFAU (il fête ses 100 ans aujourd'hui
même), qui après avoir été
"interné" en 1939 dans le
camps de concentration de Gurs, dans les Pyrénées Atlantiques, est
retourné en Espagne et a été condamné à ces travaux forcés. Il témoigne aujourd'hui au procès de
l'Argentine contre les crimes franquistes.
Nous étions également en décembre 2014 à Huesca, pour
l'inauguration du Parque Mártires de la Libertad, créé par l'association El Círculo Republicano de Huesca, en hommage
aux 545 républicains, hommes, et femmes aussi, fusillés par les franquistes
entre 1939 et 1945.
Et les fosses franquistes : 110 000 républicains disparus, enterrés ou plutôt
jetés dans ces fosses. Un travail phénoménal se fait en Espagne, pour les
ouvrir, identifier les ossements et leur donner une sépulture décente, en
présence de leur famille.
Oui, la répression post guerre a été terrible en Espagne, et
a duré des années, sans compter la chape de plomb qui s'est abattue sur eux, la
peur de parler. La parole s'est libérée il y a peu.
Les Républicains Espagnols ont souffert également en France,
d'abord par cette amère défaite, puis par les conditions d'accueil qu'ils
espéraient autres : les hommes (dans certains cas des femmes et des enfants aussi)
enfermés dans les camps de concentration, cernés par les barbelés et gardés par
les tirailleurs sénégalais. Mais
les familles, femmes, enfants, personnes âgés, ont été mieux accueillies, dans
des refuges. A St Gaudens, la famille de ma mère a été aux Haras de St Gaudens
une dizaine de jours (ils étaient 320) puis au refuge de Miramont. Ils
se sont intégrés et nous ont légué leurs valeurs, les valeurs de la République.
Et de nombreux républicains espagnols ont continué le combat
antifasciste en s'engageant dans la Résistance lors de la 2de guerre mondiale,
comme Martín ARNAL, ou dans la légion étrangère comme Jean RUIZ de St Gaudens
ou comme mon oncle Aurelio ESCANERO. M RUIZ s'est engagé dès mars 1939 depuis
le camp d'Argelès. Il a combattu en Afrique du Nord et a été fait prisonnier en
Tunisie en 1943. Il a été envoyé dans un camp de concentration en Pologne d'où il a été libéré par les russes en juin
1945. Deux mots reviennent : froid et faim.
9 ans de guerre pour tous ces jeunes, à défendre la République et la
Liberté. Nous sommes
extrêmement fiers d'eux.
Notre
association s'appelle MEMORIA Y EXILIO : l'exil, ils l'ont connu, et la
mémoire, nous la transmettons, nous, leurs enfants et petits enfants. Merci
aux professeurs qui enseignent cette histoire méconnue, et merci aux élèves de
s'y intéresser.
Muchas gracias a las asociaciones republicanas de Barbastro,
Bielsa, Huesca y Monzón por haber venido en este homenaje. Recordandonos la
excursión que hicimos con Rubén y sus amigos, en este camino del exilio en
junio del año pasado. Muy símbólico encontrarse las 2 asociaciones en el
refugio de Benasque, tras haber subido cada uno de un lado de este Puerto.
L'an dernier, avec
l'association La Bolsa de Bielsa, nous avons parcouru ce chemin de l'exil, montant
chacun d'un côté du Port de Vénasque. Notre rencontre au refuge du Vénasque
était très symbolique et un moment très fort pour nous.
Pour finir, merci à toutes les associations, françaises et
espagnoles, pour le travail qu'elles accomplissent et pour nous avoir permis de
mieux connaître l'histoire de notre famille. Et merci à notre Président, Jules
Estaran.
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